Les voleurs de bœufs déciment les élevages

Black Immigrant Daily News

The content originally appeared on: Guadeloupe FranceAntilles

Par Anthony BASSIEN-CAPSA (a.bassien-capsa@agmedias.fr)
Jeudi 13 Octobre 2022 – 06h51

Depuis quelques mois, d’après les éleveurs de bovins le vol de leurs animaux s’est intensifié. Les malfaiteurs agissent la nuit et n’hésitent à revenir parfois pour finir le travail. Sans témoin, il est quasi impossible de les retrouver. Ces vols à répétition mettent en péril les exploitations.

Depuis quelques mois, les éleveurs de bovins connaissent une situation difficile. Au nombre des problèmes qu’ils rencontrent (lire par ailleurs) il faut ajouter le vol de leurs animaux et de leurs outils de travail. Ce qui les décourage. Ils sont plusieurs à avoir alerté la Sica (Société d’intérêt collectif agricole) Cap Viande, basée à Baie-Mahault et présidée par Firmin Lodin, à ce sujet. Tel est le cas de Sylviane Edwige, éleveuse de bovins installée à Petit-Canal. En l’espace d’un mois, elle s’est fait voler 8 de ses bêtes. Elle a prévenu les forces de l’ordre, mais tout comme bon nombre de ses homologues, les plaintes qu’elle a déposées sont restées pour l’heure sans suite. Philippe Valcy, un de ses confrères, basé à Morne-à-l’Eau, a lui aussi subi le même sort, puisqu’on lui a volé 4 de ses bœufs. Ces vols de bovins ont un impact considérable sur la production de viande bovine qui, en Guadeloupe, subit un déclin de 50% depuis une dizaine d’années. De plus de 80 000 têtes au début des années 2010, le cheptel a diminué de moitié et compte désormais moins de 40 000 têtes. Les producteurs sont désemparés.

Le cheptel bovin de l’exploitation de Charly Singarin à Desvarieux (Petit-Canal) – Roberto Birhus

Pourquoi déposer plainte ?

Bien qu’il soit chanceux de n’avoir pas subi de vol, Charly Singarin, éleveur basé à Desvarieux (Petit-Canal) et président du Syndicat régional des éleveurs de la Guadeloupe est inquiet. Son cheptel compte entre 30 et 40 bêtes. Il craint d’être une des prochaines victimes. Si cela finissait par lui arriver, il pense qu’une plainte déposée à la police ou à la gendarmerie, ne l’aidera pas à protéger ses bêtes, en raison du manque d’informations sur les voleurs. Il n’y a pas de témoins et il n’y a aucune indication sur les véhicules avec lesquels les malfaiteurs opèrent. Ils agissent la nuit et dans des lieux reculés où il n’y a pas ou peu d’habitations. Il se plaint de ne pas recevoir d’aides de la part des SICA comme Cap’Viande ou Sélection Créole, ni de l’Iguavie (Interprofessionnelle guadeloupéenne de l’agriculture, de la viande et de l’Élevage), ni de la chambre d’agriculture de la Guadeloupe, pas même de la Région ou du Département. Il en profite également pour critiquer les entreprises de la grande distribution, qui selon lui, ne soutiennent la production bovine locale, en dépit de leur message publicitaire.

Des solution difficiles à trouver

Charly Singarin estime que pour protéger son exploitation, il n’y a pas 30 solutions : les forces de l’ordre devraient multiplier les rondes autour des élevages (bovins, caprins, porcins, les volailles). L’installation de caméras de surveillance n’est pas à envisager selon lui, car les élevages se trouvent le plus souvent dans des zones qui ne sont pas électrifiées. A moins d’opter pour le solaire. L’éleveur est pessimiste. Il craint de devoir jeter l’éponge. A l’entendre, il a effectué de lourds investissements et comme pour ses autres confrères, le vol de ses animaux mettraient en péril son exploitation.

Charly Singarin, éleveur de bovins à Desvarieux (Petit-Canal) – Roberto Birhus

« Des dispositifs de sécurité devrait être mis en place »

Pour Firmin Lodin, président de la SICA (Société d’intérêt collectif agricole) Cap’Viande, « il y a beaucoup de remontées de la part des éleveurs de bovins qui signalent des vols de leur bétail, mais aussi de leur matériel. Les exploitations sont également vandalisées, ce qui pénalise grandement la production de viande bovine », déplore-t-il. Firmin Lodin ignore le profil-type des voleurs, mais il constate l’existence de réseaux puisque les animaux ne sont pas volés à l’unité, mais en groupe. Ce sont non seulement les bêtes attachées à des piquets par des chaînes, mais aussi celles qui sont en liberté à l’intérieur d’exploitations délimitées par des clôtures et qui sont reliées entre elles par des couloirs de contention et regroupées dans des enclos. Les voleurs recherchent surtout les plus belles d’entre elles. Beaucoup d’éleveurs ont déposé des plaintes à la gendarmerie ou à la police mais en vain. Il n’y a pas de témoins des vols, pas de plaques d’immatriculation, de renseignement ur la marque ou le modèle des véhicules utilisés par les voleurs. Le président de Cap’Viande estime qu’en 10 ans, le cheptel bovin a diminué de 50% en Guadeloupe. Face aux difficultés, certains éleveurs ont cessé leurs activités. Firmin Lodin pense qu’il serait nécessaire de mettre en place des dispositifs de sécurité afin de protéger le cheptel bovin ainsi que la production de chaque éleveur. Cela passerait par exemple par l’installation de pylônes sur lesquels seraient placées des caméras de surveillance, afin de détecter les faits et gestes des voleurs et ainsi d’alerter les autorités ou encore recruter des chiens de garde.

Firmin Lodin – Roberto Birhus

Mettre des caméras solaires

Pour Patrick Sellin, président de la chambre d’agriculture de la Guadeloupe, les vols de bovins sont récurrents et au moins chaque éleveur de l’archipel en a perdu un. Il a d’ailleurs lui-même perdu 4 des siens. Selon lui, « les voleurs peuvent se cacher derrière n’importe qui, car on a du mal à les retrouver ». Cela joue donc sur le moral des éleveurs qui se retrouvent par conséquent dégoûtés et a parallèlement entraîné une baisse considérable du nombre de têtes dans le cheptel guadeloupéen ainsi que de la production de viande bovine. M. Sellin précise que lorsque les éleveurs déposent leurs plaintes à la gendarmerie, ils font part de leurs soupçons mais il n’y a pas pas de preuve. Pour le président de la chambre d’agriculture, les vols de bovins constituent une « perte sèche aux yeux de l’agriculteur ». Cependant, Il existe une convention mise en place avec la gendarmerie (mais pas encore avec la police) pour faire des rondes autour des exploitations. Patrick Sellin recommande également de mettre en place des dispositifs de sécurité sur celles-ci (caméras de surveillance fonctionnant à l’énergie solaire).Sur le plan agricole, la chambre d’agriculture s’emploie avec les éleveurs de relancer la filière bovine. L’idée est de miser sur la rusticité de la vache créole moins sensible aux maladies.

Patrick Sellin – Roberto Birhus

Les maladies, l’attaque des chiens errants…

Les éleveurs de bovins en particuliers doivent faire à différentes maladies qui touchent leur cheptel. La gale (maladie de la peau touchant les bovidés et provoquée par des acariens – notamment des mouches- est une de celle là. Elle crée des lésions de la peau parfois très importantes et très douloureuses. Une situation qui est fréquente dans les élevages allaitants, mais aussi chez les laitiers. Ils doivent aussi faire face à la tique sénégalaise (maladie également transmise par les mouches), à l’attaque des chiens errants ou encore à l’augmentation du prix des intrants. Les trois années de sécheresse et les deux années de crise sanitaire qui ont ralenti la filière bovine sans compter le manque de foncier agricole.

NewsAmericasNow.com

Advertisements
0 replies

Leave a Reply

Want to join the discussion?
Feel free to contribute!

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *